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  • Photo du rédacteurAissata Sylla

Douleur de Femme


Fermez les yeux, respirez profondément, laissez vous emporter par le pouvoir de votre imagination. Maintenant, imaginez un objet tranchant, une lame par exemple, entrain de vous taillader les organes génitaux, sans anesthésie ou calmant quelconque. Vous criez. Vous pleurez. Vous vous débattez, mais vous êtes retenu par des adultes qui vous empêchent de bouger. Horrible n'est ce pas? Vous êtes en train de vous faire exciser comme plus de 125 millions de femmes dans le monde.

La Mutilation Génitale Féminine (MGF), couramment appelée excision a longtemps été un sujet tabou qui continue de faire souffrir des communautés entières. C'est un de ces phénomènes connus de tous mais ignoré par la majorité. C'est donc pour cela que je vous invite à vous confronter à cette réalité à travers mon article.

Certaines parties de l'article risquent d'être crues pour certains. J'aurais voulu demander aux âmes sensibles de s'abstenir, mais toutes ces filles qui se font mutiler n'ont pas ce choix. Ainsi, faisons leur honneur en prenant le temps de nous éduquer sur le sujet de sorte à faire face à leur vécu.

Commençons avec la base. Il existe 4 principaux types de mutilation génitale féminine:

-Type 1- la clitoridectomie: ablation partielle ou totale du clitoris

-Type 2 - l'excision: ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, avec ou sans excision des grandes lèvres.

-Type 3 - l'infibulation: rétrécissement de l’orifice vaginal par recouvrement, réalisé en sectionnant et en repositionnant les petites lèvres, ou les grandes lèvres, parfois par suture, avec ou sans ablation du clitoris (clitoridectomie).- Le cas de 62% des femmes en Somalie.

-Type 4 - les autres interventions: toutes les autres interventions néfastes au niveau des organes génitaux féminins à des fins non médicales, par exemple, piquer, percer, inciser, racler et cautériser les organes génitaux.

Ces pratiques qui datent de l'Egypte pharaonique sont principalement concentrées dans 30 pays d'Afrique et du Moyen Orient et dans certaines communautés d'immigrants ailleurs dans le monde.

Bien ancrées dans les traditions, les MGF sont justifiées de plusieurs manières. En privant la femme de plaisir sexuel, elles sont censées aider la jeune fille à préserver sa virginité jusqu'au mariage et à rester fidèle à son époux lorsqu'elle est mariée. Dans certaines communautés, la femme est même considéré impure si elle n'a pas été excisée et tout enfant qu'elle a, est marginalisé par la société. L'excision est considérée comme une norme sociale dans ces sociétés. Le plaisir et le respect de l'homme sont les priorités, quels que soient les répercussions sur la santé de la femme.

Eh oui, les MGF ne sont pas juste douloureuses, mais ont des conséquences négatives et irréparables sur les femmes. Elles sont victimes de complications à l'accouchement, au point de souvent y perdre la vie, de problèmes urinaires, sans compter les cicatrices psychologiques. Ces mutilations causent également des douleurs atroces lors des rapports sexuels. Par exemple, lors des rapports sexuels et des accouchements, une femme ayant subi le type 3 se fait "découdre" les lèvres qui avaient été cousues pendant sa mutilation.

Tous ces méfaits sont de plus en plus connus par les sociétés. Les femmes ayant subi ces mutilations en sont les témoins directs. Mais comment cette pratique est-elle encore existante à une si grande échelle? Comment expliquer que les femmes elles -mêmes jouent un rôle crucial dans le maintien de ces pratiques?

"C'est la tradition!"

En Afrique, la tradition est primordiale. Elle passe avant tout. Des analphabètes aux grands diplomés, des milieux ruraux au milieux citadins, de la diaspora à la population locale, les traditions jouent un rôle primordial dans nos valeurs et dans nos manières de penser. Comme toute chose, cela a des avantages et des inconvénients.

En effet, certaines traditions nous permettent de garder les pieds sur terre et de survivre dans ce monde de plus en plus fou. Mais d'autres traditions, qui appartiennent à une époque où les populations n'étaient pas aussi informées que maintenant, continuent de nuire à nos sociétés. Et les MGF font parties de cette dernière catégorie.

Des femmes, ayant elles -mêmes vécu ces mutilations y poussent les jeunes filles de leur sociétés. Ces femmes qui ont elles -mêmes eu mal et subissent peut être encore les conséquences de cet acte sur leur santé. Par exemple, en Guinée où 96% des femmes sont victimes de MGF, seulement 19% des femmes et 42% des hommes pensent que cette pratique devrait être arrêtée. Certaines jeunes filles se font même exciser à l'encontre de leur parents, par leurs tantes ou grands mères. En effet, au Mali, 58% des femmes victimes de FGM ont été excisées à l'encontre de leur mères. Mais "c'est la tradition, tout le monde doit passer par là, c'est un mal nécessaire".

Il ne faut pas cependant, ignorer certains progrès remarquables. Selon l’ONU Femmes “une adolescente a aujourd'hui ⅓ de moins de risque de subir une excision qu’il y a 30 ans.". Dans certains pays, cet acte est maintenant un crime condamné par la loi, passible d'une peine de prison. Il y a un grand nombre d'organisations qui ont fait de la lutte contre les MGF leur principal but. Des campagnes de sensibilisation ont lieu. Les témoignages de certaines personnalités ayant été victimes de MGF, telles que Inna Modja et Waris Dirie ouvrent les yeux à certains. On parle aussi maintenant de chirurgie réparatrice, opération que seules les plus fortunées peuvent se permettre, pour réparer l'appareil génital d'une femme ayant subi des mutilations.

Cependant, ce n'est pas assez. Il y a encore trop de femmes qui souffrent pour une tradition qui n'est plus d'actualité. Comme le disait Amadou Hampâté Bâ, écrivain et ethnologue malien : «Il y a des pratiques que nos ancêtres eux-mêmes, s’ils revenaient à la vie, trouveraient caduques et dépassées».

Les traditions ne se changent pas du jour au lendemain, c'est un long processus, qui demande la participation de tous. Croyez moi, le simple fait d'en parler autour de soi peut faire la différence. Il m'a suffit d'en parler à ma mère pour savoir que cette pratique n'arrive pas qu'aux autres, mais que certaine femmes de ma famille directe en ont été victimes; ce qui m'a poussé à me documenter sur le sujet et à écrire cet article.

Joignez vous donc à moi, brisons ce lourd silence et faisons tous un effort, chacun à notre niveau, pour mettre fin à ce supplice.

Sources:

http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs241/fr/

http://www.humansforwomen.org/le-blog/quel-bilan-pour-les-mgf

https://www.unicef.org/french/protection/files/00-FMGC_infographiclow-res.pdf

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